Qu’est-ce que le Tanzan Nô ?

  Le Tanzan Nô est un projet qui s’est déroulé du 2011 à 2016, visant à réinterpréter la signifiance de Nô dans la société moderne en organisant les consécrations de Nô au Sanctuaire Tanzan (談山神社, l’ancien temple de Myôraku [妙楽寺]) à Tônominé (多武峰), Nara. Le projet a débuté en 2011 avec la représentation votive de la pièce « Okina », et il a monté le total de six pièces de Nô depuis.

  La ville de Sakurai est connue comme le point du départ pour diverse ancienne culture japonaise, étant le berceau du Sumo, le site du premier théâtre national du Japon et le lieu de création du premier poème dans le Man’yôshû (万葉集, la plus ancienne anthologie de poésie japonaise qui existe). Les montagnes de Tônominé se situent au sud de cette ville et elles sont elles aussi l’origine du théâtre Nô. Pendant la période Muromachi (室町時代, vers 14e à 16e siècle), dans laquelle Kan’ami et Zéami perfectionnèrent l’art du Nô, il y eut une obligation annuaire pour les Yamato Sarugaku Yonza (大和猿楽四座, ou les quatre Troupes de Yamato Sarugaku [Forme du spectacle vivant qui est l’origine de Nô et Kyôgen] sont celles qui sont devenues des quatre écoles de Nô qui subsiste : Kanzé, Hôshô, Komparu et Kongô) à visiter Tônominé afin d’y dédier aux dieux des représentations de Nô. Selon les archives, les acteurs y établirent des modes d’exécution particulières, comme celle de Gusoku Nô (具足能) dans laquelle on utilisa des véritables chevaux et armures et les troupes furent en concurrence l’une avec l’autre, présentant chacune des pièces créées nouvellement  pour l’occasion. Nous pouvons facilement imaginer l’importance de cette visite pour les acteurs Sarugaku par le fait que la négligence de ce voyage à Tônominé entraînait une conséquence aussi sérieuse que l’expulsion de la troupe.

Sanctuaire Tanzan


  Toutefois, le pèlerinage à Tônominé cessa vers le milieu du 16e siècle. À l’ère Meiji, le lien entre le Tônominé et le théâtre Nô devint en outre oublié à cause de l’expulsion de bouddhisme de l’époque. Le Tônominé fut un lieu de syncrétisme shinto-bouddhiste depuis le Moyen Age japonais, mais à l’ère Meiji on détruisit le temple de Myôraku et le renomma le « Sanctuaire Tanzan ». La consécration annuaire de Nô au Shunié (修二会) de Temple Kôfuku (興福寺) et à la Fête de Kasuga Wakamiya (春日若宮おん祭) reste à ce jour, mais le pèlerinage à Tônominé, qui se compta autrefois parmi les trois grandes responsabilités du Yamato Sarugaku, reste aujourd’hui presque complètement oublié.

  En dépit d’un tel oubli, la visite de Takeshi UMEHARA au Sanctuaire Tanzan et sa rencontre avec le masque okina (, vieillard), « Matara Jin Men (摩多羅神面, le masque du dieu Matara) » guidé par Prêtre Chiriro NAGAOKA, ont donné l’élan pour le rétablissement de rapport entre le Nô et Tônominé. C’est ainsi que le 16 mai 2011, fêtant l’achèvement fort attendu de la rénovation du Gonden (権殿, le hall secondaire, anciennement appelé Jogyôdô[常行堂]), nous avons réalisé une représentation consacrée du Nô « Okina », incarné par le 26e chef de l’école de Kanzé, Kiyokazu KANZÉ, utilisant le Matara Jin Men.

la représentation votive de la pièce « Okina » (2011)

Okina : Kiyokazu Kanze


  Le Matara Jin Men est un masque okina plus grande que le moyen et le « Matara Jin » signifie un dieu entouré de mystère, qui est considéré d’avoir un lien étroit à la création du Nô « Okina ». Le « Matara Jin Men » était inscrit dans le Gonden, dans un espace appelé « Ushirodo (後戸, littéralement la porte arrière) », où les moines bouddhistes jouaient divers arts vivants consacrés aux déesses. Celui pourrait être le lieu de naissance de « Okina », la plus importante pièce de Nô qui prie pour la « paix du monde et du pays (天下泰平、国土安穏) » et célèbre la « fertilité du sol (五穀豊穣) », celle qui a été décrite comme « être Nô et ne pas être Nô ». C’est ainsi que la représentation de « Okina » dans le Gonden, offerte au dieu par le chef de l’école Kanzé, a été en soi un événement historique.

Matara Jin Men


  Suivant cette performance, on a créé le Comité exécutif du Tônominé Tanzan Nô pour organiser les consécrations consécutives de Nô au Sanctuaire Tanzan et le Projet Tanzan Nô a été ainsi officiellement lancé en 2012 comme un plan quinquennal. Les éminents acteurs de Nô se sont rassemblés chaque année de partout au Japon et ils ont participé dans les consécrations, parmi lesquelles la représentation de « Okina » dirigé par Kiyokazu KANZÉ, utilisant le Matara Jin Men. En 2015 Kazufusa HÔSHÔ, le 20e chef de l’école Hôshô, s’est joint le projet. Enfin en 2016, le projet a marqué la fin avec la consécration de « Sanbansô (三番叟) », qui a été représenté en utilisant le masque « Kokushikijô (黒式尉) » et en suivant une méthode qui s’appelle le « Okina Hôénoshiki (翁法会之式) », qu’on estime être la méthode employée à Tônominé.

  En dehors de ces représentations consacrées, nous avons organisé deux colloques pour considérer la signifiance de Tônominé dans le théâtre Nô, ainsi que pour discuter sur la mise en position plus générale de Nô et du « Okina », le vieillard, dans la culture japonaise. Grâce à ces discussions, nous avons redécouvert que les endroits liés au Nô comme Yûsaki (結崎) et Tobi (外山), où se trouvaient respectivement le théâtre de Kanzé et celui de Hôshô, existent tous au bord du fleuve de Tera (寺川, littéralement le fleuve de temple), et que la source de cette rivière se trouve à Tônominé. La découverte a ouvert un ensemble de nouvelles perspectives qui nous mènent à relire l’histoire non seulement du théâtre Nô, mais l’histoire de Yamato entier et que nous appelons aujourd’hui le « Terakawa Culture Studies ».

  En 2013, à l’occasion du 650e anniversaire de la naissance de Zéami et le 680e anniversaire de celle de Kan’ami, nous avons porté le masque de Sanctuaire Tanzan pour une représentation à l’étranger, dans l’ancien château de Givray, situé à Bruyères-dur-Fère. Ce village est connu comme le lieu de naissance de Paul Claudel, qui a eu un aperçu perspicace de la nature même de Nô et a laissé la fameuse citation : « le Nô, c’est quelqu’un qui arrive ».

  En mai 2015, le projet « Tanzan Nô » a eu lieu aussi dans le Théâtre national du nô, encore en utilisant les masques que possède le Sanctuaire Tanzan.

Château de Fère Festival de NÔ (2013)

NÔ《Hagoromo》Shite : Kiyokazu Kanze


  Ce site web partagera les archives des consécrations de Nô et les divers autres événements liés au projet qui ont eu lieu pendant 2011 à 2016.

  Ce projet sur six ans n’aurait pas été possible sans le soutien inconditionnel de Monsieur Seichi Katô, l’ancien président de l’Okasan Securities Co., Ltd. M. Katô s’est éteint, à notre grand regret, le 19 janvier 2016 à l’âge de 87. Nous désirons y exprimer notre profonde gratitude pour les années de son appui pour notre projet et prions pour le repos de son âme.

  Nous espérons sincèrement que ces archives toucheront beaucoup de gens et qu’elles nous offrent une occasion à réexaminer l’origine de Nô et de tous les spectacles vivants.

La Société de préservation de Tanzan Nô